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13 avril 2014

Conseil départemental : ne nous trompons pas de combat !

Le conseiller général de Saint-Avertin, par ailleurs maire de la commune, n'est pas content. Pas content du tout. Il l'a écrit dans un courrier rédigé à en-tête du Conseil général (dans lequel il fait partie de l'opposition). Ce qui le met en colère ? L'annonce lors de la déclaration de politique générale de Manuel Valls de la remise en cause, à échéance de 2021, des conseils départementaux et - par voie de conséquence - des départements.

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La colère du conseiller général s'inscrit dans toute une série de protestations, toutes tendances politiques confondues, essentiellement de la part d'élus départementaux ou régionaux. " Le département et le Conseil Général", écrit-t-il, "c'est notre histoire, le socle de notre République, créé à la Révolution pour remplacer les provinces d'ancien régime. Le département et le Conseil Général c'est notre identité profonde, notre bassin de vie, le cadre de la solidarité et de cette proximité que veulent, à juste titre, les citoyens, en particulier en milieu rural" [c'est moi qui souligne]. C'est là un combat au nom de la Tradition et de l'ancrage dans des "territoires de vie" en réalité  auto-proclamés. A l'analyse de ces propos, il me semble en effet que monsieur Paumier se trompe de combat. Car ce qui est en jeu dans les déclarations de Manuel Valls (et pour peu qu'on sache exactement ce qu'il a l'intention de faire, car il ne l'a pas encore précisé !), c'est la rationalisation et la modernisation de notre invraisemblable mille-feuilles administratif, et non la remise en cause de je ne sais quelle compétence locale, et surtout pas de la solidarité et de la proximité. Bien entendu, qu'une collectivité locale conservera la gestion des collèges, la politique des transports, le financement de certaines prestations sociales. Bien entendu qu'il existera toujours des exécutifs locaux pour gérer les territoires au plus près des administrés. Bien entendu que la décentralisation se poursuivra. Ce n'est pas une question de façon de gouverner, mais de recherche de l'échelle la plus pertinente pour le faire.

Les temps changent, les structures géographiques changent, et la perception des citoyens sur leurs territoires aussi. Le contexte qui avait nécessité la création des départements et des communes a disparu depuis bien longtemps. Rendez vous compte : les départements ont été découpés de telle sorte que le chef lieu en soit accessible de n'importe quel point en une journée de cheval. Si nous devions appliquer ce principe aujourd'hui, l'Europe entière serait un seul et même département ! De la même façon qu'il est heureux que les départements, puis les régions, aient mis fin au découpage archaïque des anciennes provinces à partir de la fin du XVIIIe siècle, il serait heureux qu'une réforme territoriale ambitieuse en finisse avec l'archaïsme du découpage départemental et régional au début du XXIe siècle. Ce qui est moderne et novateur dans un contexte donné ne l'est évidemment plus 220 ans plus tard ! Dans le contexte de la mondialisation, de l'ouverture internationale, d'un brassage permanent des populations depuis la fin du XIXe siècle, la France n'a plus les moyens ni l'intérêt de se fragmenter en dizaines de milliers d'entités territoriales, qui sont à la fois un facteur de complication dans les relations entre les usages et les élus, et un facteur de dépenses publiques dispendieuses et irrationnelles. 

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Avec ce courrier, le conseiller général de Saint-Avertin entre incontestablement en campagne pour les élections départementales de 2015 ("La déclaration de la disparition des conseils généraux par un pouvoir national autoritaire transforme de fait les élections départementales de 2015 en référendum sur les libertés locales"). Or il le fait, me semble-t-il, sur des arguments qui n'ont rien à voir avec l'élection des conseillers départementaux. De toute façon, les conseillers départementaux élus en 2015 dirigeront les actuels départements, et ce jusqu'au terme de leur mandat. Celui-ci courra en effet tant qu'aucune structure nouvelle ne sera installée, et les départements et régions actuels continueront évidemment de fonctionner. Il faut donc continuer à les doter d'exécutifs conformes à nos valeurs, et à élire des conseillers qui gèrent des structures existantes, dans l'intérêt des citoyens, et pas des élus en place (dont on comprend bien l'intérêt qu'ils ont à défendre les structures actuelles).

Les conseillers départementaux qui seront élus en 2015 le seront pour 6 ans. C'est donc eux qui auront à piloter, sur le terrain, la réforme territoriale décidée par l'Etat. Que se passera-t-il pour les départements qui seront dirigés par des conseils départementaux hostiles à cette nécessaire réforme ? Quelle place joueront dans les nouvelles infrastructures territoriales de exécutifs qui n'auront eu de cesse que d'en dénoncer l'existance ? L'Indre-et-Loire sera en 2015 face à son avenir, et cet avenir ne peut se construire avec les chimères du passé, qu'on ne s'y trompe pas ! Tant qu'à politiser sur ce terrain le scrutin à venir, autant poser les choses clairement : oui il faudra des conseils généraux responsables et visionnaires. Non l'Indre-et-Loire, pas plus qu'un autre département, ne pèsera d'aucun poids dans les décisions futures s'il est gouverné par un conseil départemental conservateur et replié sur des considérations locales, voire identitaires, d'un autre temps. Et ce n'est pas là affaire d'étiquette politique, mais de responsabilité. Le temps des département est à présent révolu, et gouverner, c'est prévoir. Dans un département tout autant qu'à la tête de l'Etat.

 

La lettre en question, à en-tête du Conseil Général (pourtant socialiste) d'Indre-et-Loire :  2014_04_10_Lettre_JGP

 Lionel JEANJEAU

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